PRÉSENTATION DE L’ÉDITEUR :
« Si vous ou une de vos amies tombe enceinte alors qu’elle ne le souhaite pas, vous devez appeler un médecin et demander Jane. » Jeune étudiante à l’université de Toronto, Nancy Mitchell se raccroche désespérément à ces mots lorsqu’elle découvre sa grossesse en 1980.Le jour du rendez-vous avec le docteur Evelyn Taylor qui pratique des avortements clandestins, Nancy suit à la lettre les consignes : ne pas donner de nom de famille, venir seule, frapper sept fois à la porte… Elle sait que se rendre au cabinet de Seaton Street pourrait l’envoyer en prison. Pourtant, quelques années plus tard, elle rejoint le réseau Jane, en dépit du danger, pour venir en aide aux jeunes femmes dont elle partage le déchirement. Nancy trouve rapidement sa place dans cette famille de coeur et comprend que chacune a ses propres raisons et secrets pour prendre au quotidien ces risques insensés.Pour Evelyn Taylor, l’histoire a commencé près de vingt ans auparavant, dans un établissement religieux où les « filles perdues » étaient envoyées donner naissance…Inspiré de faits réels, un éclairage bouleversant sur un militantisme historique, porté par les destinées de femmes en quête de liberté
2010
Une lettre jamais remise à sa destinatrice, elle ne sera découverte que 7 ans plus tard et changera la vie de 3 femmes
2017
Angela vient de faire une fausse couche.
Elle trouve une lettre dans une commode du magasin d’antiquités où elle travaille.
Une lettre adressée à une Nancy, écrite par sa mère peu de temps avant sa mort et qui révèle qu’elle a été adoptée.
Et, comme si ce n’était pas assez, sa mère adoptive révèle à cette Nancy que sa mère ne l’a pas abandonnée volontairement, mais a été obligée par le foyer où elle était.
Cette mère adoptive rongée par les remords d’avoir toujours gardé le secret sur l’adoption de sa fille lui donne le nom de sa mère biologique, Margaret Roberts et lui conseille de la rechercher.
Une missive qui va ébranler Angela.
Qui va l’entraîner dans une quête.
« Parce que lorsqu’un secret s’est échappé, il n’y a plus moyen de le remettre dans sa boîte. »
Toronto 1960
Margaret arrive au foyer Sainte Agnès.
Ses parents l’ont envoyé là le temps de sa grossesse
Elle a eu des relations hors mariage et même si le futur père était son fiancé c’est inadmissible dans cette communauté très catholique.
Elle devra donner son bébé à l’adoption, ne jamais révéler son nom de famille, pas de téléphone, uniquement du courrier soumis à la censure.
Au terme de sa grossesse, elle devra encore rester 3 mois pour « rembourser sa dette »
Un foyer digne d’une prison.
Une sœur digne du gardien le plus froid que tu peux imaginer.
Un vrai cerbère.
C’est sombre, froid, rien n’est accueillant au sein du foyer.
Elles sont des parias, et sont traitées comme telles.
Elles sont appelées détenues, ont toutes le même uniforme.
Un environnement sévère, militariste et punitif instauré par la religieuse.
Toronto 1979
Nancy, 19 ans, accompagne son amie Clara chez un homme qui pratique l’avortement illégal.
Une hémorragie se déclare.
Nancy n’a d’autre choix que d’emmener Clara à l’hôpital.
La doctoresse de garde lui conseille que si un jour, elle ou une de ses amies, souhaite avorter, de téléphoner à un médecin et de demander Jane. Uniquement, Jane.
Voilà un peu le pitch de départ.
Tu lis ces 3 personnages.
3 personnes et puis toi, lectrice.
Oui toi, car tu es concernée aussi.
Je pense que c’est la grande force du livre.
Il s’adresse à toutes les femmes.
De la jeune fille à la grand-mère
De la childfree à la mère de famille.
Aux jeunes qui ont peur, qui ne savent pas.
Un texte vraiment pertinent et juste.
Je suis bien placée pour le dire.
Je suis un peu Angela, un peu Evelyn, un peu Nancy et je connais pas mal de Tina.
« Ici, il n’y a pas de rêves, pas de lumière. Les ténèbres dureront. Seulement quelques mois pour certaines. Des années, pour d’autres. Et d’autres encore ne reverront jamais la lumière. Ces filles sont perdues. Et elles paieront toutes pour leur rédemption. »
Heather Marshall te donne la trame de cette grande tapisserie qu’est la vie.
Le passé tissé centimètre carré par centimètre carré.
La souffrance qui suinte entre les murs de Sainte-Agnes.
Une souffrance qui jaillit comme un fleuve en crue.
Tu la ressens pleinement cette douleur.
Ces questions sans réponses de filles à qui on n’explique rien.
Elles ne sont ni entendues ni écoutées.
Des larmes refoulées, des cris désespérés.
Ils jaillissent des murs, mais aussi des pages, toi, lecteur, tu les entends ces filles.
À toi, elles peuvent hurler leur douleur.
Te confier leur détresse émotionnelle.
Ce foyer qui n’a absolument rien de réconfortant.
C’est une prison.
Une série de pièges et de cages disposés à l’intérieur d’un labyrinthe de confusion et de mensonges.
Une geôle sans issue.
Si. Une, elles sortiront une fois leur dette réglée !!
Tu vas rencontrer des femmes courageuses, fortes et indépendantes.
Elles sont aux commandes de leur vie.
Elles se battent pour leurs sœurs, leurs filles, toi, moi, pour nous et celles qui suivront.
Des femmes qui aident les femmes.
Une très forte sororité.
Je me suis reconnue dans ce féminisme.
Un combat qu’elles mènent pour leurs filles, et pour les filles de leurs filles.
Pour garantir qu’un cycle atroce serait brisé, et que la prochaine génération aurait une vie plus belle que la leur.
Pour léguer aux femmes un monde où personne ne pourra leur dire que leur corps ne leur appartient pas.
Le droit de faire un choix.
Que chaque enfant soit désiré, que chaque mère soit mère parce qu’elle l’a voulu.
Heather Marshall ne parle pas uniquement d’avortement, elle parle aussi d’adoption, d’homosexualité, du parcours lourd de la procréation médicalement assistée, des joies et des peines de la maternité.
Elle te parle du seul petit moment qui peut basculer une existence, ou 2, parfois plusieurs.
Les thèmes du roman vont bien plus loin que ce que dévoile la 4e de couverture et mon avis.
Un livre très riche qui te parlera d’amour, de respect, du poids du secret, des questions que l’on se pose en tant que femme, du 28 janvier 1988, le jour où la Cour suprême du Canada a accordé aux femmes des droits sur leur propre corps.
Le foyer Sainte-Agnes est une fiction, l’autrice s’est basée sur des descriptions des témoignages de nombreux foyers qui ont existé partout dans le monde.
Elle s’est documentée principalement sur ceux qui existaient en Amérique et au Canada. le réseau Jane est aussi une invention, un mélange des nombreux réseaux clandestins qui existaient dans les grandes villes du monde, l’un d’eux était situé à Chicago et portait le nom de Jane,
Une fiction historique sur la lutte pour les droits de reproduction et la privation systémique de soins de santé sans danger sont une réalité aujourd’hui.
Depuis des décennies, le droit à l’avortement, les droits en matière de reproduction est un sujet de controverse alors qu’ils sont essentiels.
La politisation des corps semble ne jamais prendre fin… et aujourd’hui plus que jamais, je pense à l’annulation de l’arrêt Roe v. Wade.
Une annulation qui m’a marqué, qui continue à me révolter.
On n’est plus dans une fiction, ce n’est pas une dystopie, c’est la réalité.
Ce n’est pas un roman sur l’avortement, mais un roman sur la maternité.
Sur le désir d’être mère et le désir de ne pas être mère, sur tous les spectres compris entre ces deux extrêmes.
J’ai adoré ce roman. Je l’ai vécu intensément. Par chacune des protagonistes. J’ai écouté leurs histoires, j’ai été ébranlée et émue ; pour autant, ce n’est pas un roman dramatique.
Non, c’est vraiment un roman de femmes pour les femmes. Toutes les femmes.
Un livre engagé qui est, pour moi, essentiel.
« Tout ici bas est éphémère, dit le vent. Il n’y a plus de temps à perdre. »
✩ Le réseau Jane ⟷ Heather Marshall ⟷ 464 pages ⟷ Éditions Charleston, le 14 mars 2023✩
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