PRÉSENTATION DE L’ÉDITEUR :
Sans le savoir, Camille et Jérémy marchent l’un vers l’autre depuis leur naissance. Devenus adultes, ils s’aiment sans parvenir à être heureux ensemble, Jérémy s’efforçant de cacher à Camille les ombres qui le hantent. Le jour où Camille lui confie le désir de porter leur enfant, Jérémy ne parvient plus à tenir debout face aux possibles sur le point de s’écrire. La perspective de devenir père convoque lentement toutes les morts, car comment donner la vie quand on peine soi-même à trouver sa place parmi les vivants ?
Dorénavant, en fin d’article ; tu retrouveras un trigger warning ; tout en bas pour que personne ne soit lésé et satisfaire le plus grand nombre
Le contexte de lecture
C’est Flo de Floandbooks (ici pour son avis) qui m’a donné envie de lire ce livre.
Je le connais pour ses textes en jeunesse, notamment Ueno Park, grâce aussi aux éditions Sarbacane quand je l’ai découvert par « à copier 100 fois » et « Je reviens de mourir »
Antoine Dole c’est aussi le Mr Tan, auteur de la série jeunesse « Mortelle Adèle ». J’en avais parlé ici en 2013.
Que tu veuilles le lire en jeunesse, en ado ou en adulte, je te conseille vraiment de foncer.
En cette rentrée 2021, Antoine Dole t’offre son premier roman classé en littérature générale.
Un premier roman contemporain et quelle entrée !
Je me suis plongé dans ce roman sans rien savoir.
Je n’ai lu ni le résumé ni la quatrième de couverture.
Je l’ai lu en apnée.
Ce n’est pas un coup de cœur, mais quel texte fort ? Puissant. Vibrant !
Quelle écriture !
Mon avis
Six pieds sur terre c’est : les causes, les conséquences ; les manifestations, maintenant que tu es adulte, de ce que tu as vécu quand tu étais enfant. Ce que tu pensais réparé et qui est encore brisé. Enfoui sous de multiples couches.
C’est un roman qui t’explique comment une goutte, une minuscule goutte, peut devenir un ruisseau qui se transforme en rivière pour finir en raz de marée détruisant tout sur son passage.
Ce roman va parler de l’enfance. De ces blessures qui feront partie de toi, adulte. Des failles que l’on porte en nous. Certaines, on les a oubliées, d’autres sont dissimulées derrière un sourire, cachées, tellement enterrées profondément qu’on a oublié qu’elles ont existé. Qu’elles sont encore là, qu’elles ont grandi elles aussi, qu’elles prennent tellement de place !
C’est un roman assez sombre, mais qui pousse vers la lumière.
C’est un livre qui parle, entre autres de la mort, mais qui tend les bras vers la vie.
Tu vas suivre nos deux narrateurs.
Jeremy et Camille.
Deux rescapés, pas tout à fait retapés de leur enfance.
Ils sont sur leurs deux jambes, mais ils boitent.
Ils ne le montrent pas, ils ne se le disent pas, ils ne se l’avouent pas, mais toi, qui lit les flashbacks de leur passé ; tu le sais, ce qu’il leur est arrivé.
Tu as lu comment ils ont (sur) vécu.
Camille et Jeremy, des enfants qui ont dû grandir trop vite. Trop tôt.
Je n’ai pas envie de te dévoiler quelles sont leurs plus grandes blessures ni dire qu’est-ce qui a bien pu les blesser à ce point.
Sache juste que tous deux ont vécu des moments très difficiles.
Douloureux.
Personne ne pourrait s’en sortir indemne.
À deux, ils pourraient être heureux si les chaînes du passé ne pesaient pas aussi lourdement sur leurs épaules entravant leurs faits, leurs gestes, leurs sentiments aussi.
Ils ont aujourd’hui la trentaine, l’âge de poser les valises, oui, mais leurs bagages à eux sont tellement encombrants qu’il n’y a plus beaucoup de place pour le reste. Pour le vrai.
Ce que l’on dissimule à l’autre en se disant que tout va bien. Tout ira bien.
S’aimer ils s’aiment. Chacun à leur manière. L’un, plus fort que l’autre. L’autre dans la retenue.
L’un le dit, le répète. L’autre botte en touche.
J’ai subi les révélations comme des déflagrations, des uppercuts qui m’ont fait exploser le cœur.
Quand tu penses tout savoir des personnages, tu te rends compte que leur douleur peut cacher bien pire souffrance.
Antoine Dole sublime un sujet, des sujets tellement délicats, grâce à son écriture au tempo vibrant et ses mots virevoltants.
Lyrique et métaphorique.
Poétique.
Chaque lettre de chaque mot de chaque phrase de chaque chapitre a résonné en moi.
J’aurais pu t’écrire des dizaines de citations tellement c’est beau et fort. Intense et douloureux.
Je pense que c’est le but recherché de Antoine Dole : les maux étouffent Jeremy ; les mots « t’étouffes » toi, lecteur.
C’est un presque coup de cœur.
C’est un livre que j’ai vécu profondément.
Les personnages de Antoine Dole, je les porte en moi et je m’en rends compte quand je revis ces pages en écrivant cette chronique 3 semaines après ma lecture.
Les mots et les maux de Jeremy et de Camille, je les ai lus en apnée.
Incapable de me détacher d’eux.
Du roman.
Rage, détresse, impuissance, colère, déni.
Tu te prends chaque sentiment en plein cœur.
Tu les sens vibrer dans ton corps, tellement c’est fort. Intense
Le point de bascule, l’instant T où tout a commencé.
Les secondes précédant la déflagration tu les vois défiler.
Tu voudrais crier. Secouer. Serrer les personnages dans tes bras.
Je te l’ai dit, tu ressens tout intensément.
Jeremy c’est
Un château de cartes qui tombe
Un château de sable qui s’écroule par une vague cette fois pas tellement puissante, en tout cas, celle-ci.
Seulement, ce n’est pas la première vague qui va fouler ce colosse aux pieds d’argile. Le rivage de ce garçon que j’ai tant aimé.
Jeremy c’est une maison de paille soufflée par le vent.
Camille c’est celle qui maintient les cartes ensemble.
Elle les ramasse et les repose.
Elle reconstruit inlassablement le fort de Jeremy
C’est elle qui fait écran face au vent.
Un point noir, une petite toute petite tâche, un rond de moisissure qui s’étend au plafond du logement de nos héros ; c’est le parallèle qu’établit Antoine Dole avec Jeremy et Camille.
Une toute petite tâche ; rien de grave au départ ; prend tellement d’ampleur quand on ne fait que camoufler et que rien n’est réparé en profondeur.
Tu sens très fortement les parois du corps de Jeremy se refermer sur lui, les sentiments qui le traversent, les crises d’angoisse qui monte.
C’est rugueux comme lui, il te faudra gratter tout le crépi de Jeremy pour que se révèle à toi la beauté de ce roman.
J’ai trouvé ma place à moi parmi ces mots, parmi leurs maux.
» Sans même s’en rendre compte, on marche vers ce qui nous rend vivants. «
Jeremy m’a davantage ému, je me suis sentie beaucoup plus proche de lui.
Sa souffrance, je la touchais du doigt.
Elle est si épaisse.
Un nuage dense au-dessus de sa tête.
Pourtant je connais davantage le passif de Camille, est-ce que je me suis protégée ? Oui, sans doute.
Tu sens vraiment dans tes tripes que plus tu vas avancer, plus le château de cartes construit va s’effondrer.
Ils sont si forts d’être fragiles.
Ce n’est pas de leur faute.
Les bases, leurs bases remontant à leur tout jeune âge, elles n’étaient pas terminées.
Des fondations inachevées.
Comment construire quelque chose de stable sur un socle complètement bancal ?
Cela ne se voit pas évidemment, ils portent tous deux, surtout Jeremy, un masque cachant leur véritable personnalité.
L’un ne veut pas être aimé.
L’autre fait tout pour aimer.
L’un le porte volontairement, l’autre n’en a pas conscience.
L’un pense que tout le monde est dupe. Mais même lui l’est. Il s’est complètement perdu en lui-même.
Antoine Dole en décrivant la spirale infernale t’étouffe toi aussi.
Tu sens ta gorge se serrer.
Ton thorax se refermer.
“Vivre est une inquiétude qui ne s’apaise pas.”
Six pieds sur terre est un roman qui transpire la sincérité.
C’est un cri du cœur et du corps.
Cela résonne fort et réveillera sans aucun doute ce qui est mort en toi et tout ce qui n’appelle qu’à vivre.
Six pieds sur terre.
Le titre m’intriguait.
Ne dit-on pas l’inverse ? Six pieds sous terre ?
Quand je suis arrivée à un des moments clés du roman, j’ai compris et j’ai su que je ne sortirais pas indemne de cette lecture.
Que j’allais souffrir et j’ai souffert, mais j’ai aussi vu le merveilleux !
J’ai aussi vu la splendide lumière jaillir d’un tunnel bien sombre. Glauque. Bleu foncé.
Je sais que je suis très floue, je ne te révèle rien, car je n’aurais pas pris une aussi grande claque si j’avais su dès le début.
En bref
Un roman lu d’une traite sans reprendre mon souffle.
Passionnant et émouvant.
Antoine Dole m’a prise au piège comme Jeremy et Camille sont pris au piège de leur passé.
Poignant. Intense. Terriblement vrai.
La fin m’a balayée. Éblouie.
Tout a pris sens, un autre sens, que je n’avais pas encore vu.
Parfois trop riche en métaphores, l’écriture est néanmoins splendide.
Vibrante. Palpitante.
Un tempo qui ne faiblit pas.
Tu sens l’urgence de la situation grâce à ce rythme tendu de bout en bout.
Si tu le lis, tu penseras à moi.
Les métaphores, les envolées lyriques qui te prennent en otage, le rythme qui ne faiblit jamais et t’enferme encore plus entre ses pages sont là pour une bonne raison.
C’est admirablement bien pensé. Pesé
Tu sens la plume authentique, tu sens l’homme derrière la plume.
Tu sens le cœur et les tripes.
Je te conseille de le découvrir comme moi en n’en sachant rien.
Rien que la quatrième de couverture te met sur un début de piste bien suffisant.
C’est sombre, mais aussi lumineux.
La lumière arrive tardivement, mais quand elle est là elle explose tout de couleurs et chasse le bleu froid pour le bleu lumineux.
Il y a un très beau message d’espoir.
✩ Six pieds sur terre ⟷ Antoine Dole ⟷ 252 pages ⟷ Éditions Robert Laffont, le 26 août 2021
⚠️Trigger Warning ⚠️ :
C’est nouveau, mais j’ai pu discuter avec plusieurs d’entre vous et vous préférez pour certains savoir avant de lire. Je vais donc le mettre dorénavant dans mes articles.
En fin d’article pour que les personnes qui préfèrent ne rien savoir s’y retrouvent aussi.
Dans Six pieds sur terre, on parle de dépression et de deuil. De 2 enfances pas évidentes, mais que là je ne peux pas trop développer. Si tu as besoin d’éclaircissement alors, envoie-moi un email ou un message privé sur Instagram.
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