« Ben, n’oublie pas de jouer Take my hand, precious Lord au service, ce soir. Joue-le vraiment bien. » dernières paroles de Martin Luther king junior le 4 avril 1968
Memphis, 2016
« Il ne se passe pas un an sans que je pense à elles. India. Erica. Leurs prénoms sont cousus dans chaque blouse blanche que je porte. Je raconte cette histoire afin d’inscrire leurs prénoms dans tes vêtements aussi. Pour ne pas oublier. La médecine m’a appris, véritablement appris, je veux dire, à accepter les choses que je ne peux pas changer. C’est une prière de la sérénité difficile à avaler. Je n’essaie pas de changer le passé.
Je raconte cette histoire pour que les fantômes reposent en paix. »
C’est sur ces mots que commence le livre.
Des mots écrits par Civil Towsend, l’héroïne du roman, pour sa fille Anne.
Cette histoire est liée à la sienne.
Maintenant qu’Anne a terminé ses études, Civil pense qu’Anne doit tout connaître et qu’il est temps pour Civil de retourner sur les lieux où tout a commencé.
Montgomery, 1973.
« Nous étions 8. Qu’est-ce que cela aurait pu changer ? Qu’aurait-il pu se passer ? »
À l’époque tout ce qu’elle savait, ce qu’elle pensait intimement, c’est qu’elles avaient une mission à accomplir.
Soulager le poids de la misère.
Juguler la misère avant qu’elle n’explose.
Ce que Civil et ses collègues ignorent à cette époque c’est qu’elles vont y laisser des plumes.
9 mois après avoir obtenu son diplôme d’infirmière, Civil a été recrutée pour travailler à la clinique du Planning familial de Montgomery.
Une semaine.
Un manuel d’une cinquantaine de pages, dont la moitié est consacrée au nettoyage et à l’organisation de la réserve.
La formation s’arrête là.
Sa première mission déterminera tout son futur.
Une enveloppe jaune, une visite à domicile pour deux jeunes sœurs.
Entrer dans leur maison a changé sa vie et la leur aussi.
Elle est entrée comme une grande dame prête à sauver quelqu’un.
Elle pensait tout savoir…
Cette année-là, la Cour suprême des États-Unis avait voté la légalisation de l’avortement dans certaines circonstances.
L’Alabama n’a pas encore adopté la loi.
Une intervention qui reste très coûteuse et hors d’atteinte pour la plupart des femmes. Dans la tête de Civil, elle agit en prévention.
Pour le bien des femmes.
Leur donner accès à un moyen contraceptif c’est agir au mieux pour elles.
Son père est médecin, c’est lui qui tient à l’instruire, mais il lui a enseigné aussi ce que c’est de vivre en Alabama.
Ce qu’il faut taire.
Les combats à éviter ou à mener.
Les choisir.
Elle a mené, et mène toujours une existence privilégiée. Elle n’a aucune idée de la pauvreté, la misère qui sévit dans sa ville et dans tout l’état.
Dans ce roman, tu vas côtoyer
Nina Simone, Medgar Evers, Bill Jenkins, Jo Ann Robinson et Mairy Fair Burks
Diana Ross, et deux jeunes sœurs qui n’ont jamais écouté de musique ni de télévision.
Ce livre c’est L’Alabama et le Mississippi avec toute sa diversité, sa disparité.
Les états du sud conservateurs, une zone où vivaient, à une époque, un million d’esclaves.
Ce roman aborde aussi le droit des femmes à décider pour leur corps.
De maîtriser leur vie par leur choix et non pas imposée par la société.
En ce 8 mars, il me semblait parfait pour mon avis du jour.
Je l’ai lu fin janvier, Civil me reste en tête. Tout comme ce que j’ai pu y lire qui m’a révolté.
L’autrice va aussi te parler de Roe v. Wade de 1973, plus que jamais d’actualité !!
Prends ma main c’est :
8 infirmières qui unissent leur force pour lutter pour ce qu’elles pensaient juste.
L’attentat dans l’église de Birmingham.
Ruby Bridges. Carla et Rufus Thomas et James Carr.
« 65 pour cent des mères célibataires en Alabama sont noires. Il faut qu’il y en ait moins. Donc, a-t-elle expliqué, on leur administre un contraceptif qui s’appelle le Depo-Provera. Comme ça, elles n’ont pas besoin de se rappeler de prendre la pilule ».
Un des faits, qui n’est pas fictif et qui m’a révolté, est ceci :
Un médicament qui n’a pas été approuvé par l’Agence de sécurité des médicaments et des produits de santé.
Il présente des risques réels et pourtant il est expérimenté sur les femmes que Civil soigne.
Une expérience comme celle menée sur des hommes dans le Comté de Maçon.
À Tuskegee.
Je n’avais jamais entendu parler de ces 2 scandales.
J’étais tellement sans voix en lisant cela.
En colère aussi.
« La pauvreté poussait souvent au crime dans cette ville. Le désespoir. Le racisme. Le manque de perspectives. Nous n’aidions pas seulement ces familles. Nous étions des travailleurs sociaux en quelque sorte. Mieux valait intervenir avant que la situation ne dégénère. En permettant aux patientes d’avoir un moyen de contraception, nous leur évitions d’avoir à faire des choix plus graves. »
Civil est pétrie de bonnes intentions.
Jamais elle ne peut imaginer que ses patrons, les dirigeants agissent en toute connaissance de cause.
Pour elle, ils ont raison de s’inquiéter de l’avenir des femmes.
Elle est jeune, naïve et idéaliste.
Elle va vite se réveiller pourtant et sera à l’origine de quelque chose de grand.
Là, elle aidera vraiment.
Elle tient dans ses mains les espoirs d’une famille en particulier, mais aussi de toute une communauté.
Pourtant, elle a tant de regrets.
Tu sens sa peine.
Pourquoi ces regrets, pourquoi ce voyage dans le passé, il te faudra lire le roman.
C’est révoltant, écœurant.
Tu prends conscience que les humains sont capables de tout, tu prends conscience que le monde était, et est toujours diabolique.
Comment peut-on omettre ces faits des cours d’histoire ? De l’actualité ?
La manière dont le mal et le bien peuvent coexister laissent sans voix.
Ce roman est une œuvre de fiction qui s’inspire librement de l’affaire des sœurs Relf
Inspiré de faits réels qui ont profondément marqué l’Amérique, ce roman est un témoignage percutant et émouvant, une leçon d’espoir et de dignité.
Des questions éthiques et morales sont abordées dans ce récit.
L’autrice s’est documentée dans les archives de l’époque.
Elle voulait découvrir l’impact émotionnel qu’ont pu avoir ce moment et d’autres similaires.
Les questions d’éthique médicale et de morale qui sont explorées dans « prends ma main » demeurent essentielles aujourd’hui.
Lis ce livre et lis les notes de l’autrice ! J’ai pris connaissance d’autres effets tout aussi abjects et pourtant qui datent de peu d’années ! 2010, 2013, 2020 !!!
Ce roman tire une sonnette d’alarme, il a impacté ma vie, ma vision.
Des romans comme celui-ci sont essentiels.
Un roman coup de poing.
Un uppercut que tu prends quand tu mesures toutes les conséquences.
PRÉSENTATION DE L’ÉDITEUR :
1973, Alabama. Civil Townsend est une jeune infirmière afro-américaine, fraîchement diplômée et embauchée dans un planning familial à Montgomery. Convaincue de l’utilité de son travail, elle est toute dévouée à ses patientes et assure les suivis de grossesse, mais aussi les prescriptions de contraceptifs aux jeunes filles à sa charge.
Lorsqu’elle rencontre Erica et India Williams, treize et onze ans, la vie de Civil va radicalement changer. Car, très vite, elle s’interroge : pourquoi doit-elle leur imposer une contraception alors qu’elles sont si jeunes ? Est-ce que la famille a donné son accord ? Prise de doutes, Civil commence à enquêter sur les pratiques en place dans le milieu médical de son époque. Au risque de perdre son emploi, elle mettra tout en œuvre pour dévoiler une des politiques les plus innommables des États-Unis.
✩ Prends ma main ⟷ Dolen Perkins Vasquez ⟷ 448 pages ⟷ Éditions Seuil, le 2 février 2023✩
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