PRÉSENTATION DE L’ÉDITEUR :
Elle était reine. Briséis de Lyrnessos, vénérée et respectée. Mais, hors des murs du palais, la guerre de Troie fait rage et bientôt la cité de Lyrnessos tombe sous les assauts grecs. En quelques heures, Briséis voit son mari et ses frères massacrés ; de reine, elle devient esclave. Un trophée parmi d’autres pour l’homme qui l’a conquise : le divin Achille dont les générations futures chanteront les exploits.
Captive du camp grec, Briséis doit choisir : se laisser mourir ou survivre. Survivre comme un défi à la barbarie des dieux et des hommes, survivre pour raconter, enfin, son histoire. L’histoire de la femme par laquelle la guerre de Troie a basculé.
Et avec elle, après 3000 ans de silence, ce sont les voix de toutes les femmes laissées muettes par l’Histoire qui s’élèvent. Esclaves, prostituées, guérisseuses, effacées au profit des faits d’armes des guerriers.
Avec une précision historique remarquable et un style dans la plus pure tradition homérique, Pat Barker fait naître sous nos yeux une Iliade féminine magistrale.
Je ne vais pas te mentir, j’étais assez sceptique sur ce livre.
Allais-je adhérer à une réécriture de l’Iliade et l’odyssée ?
C’est quand même un pari osé que Pat Barker prend.
Il s’agit d’une réécriture, en plus, elle choisit de mettre en lumière, non pas, les habituels héros, comme le très célèbre Achille, mais des femmes.
Surtout une, une princesse déchue, oubliée : Briséïs.
Tu liras des noms de héros que tu connais comme Menelas, Agamemnon, Ulysse, Diomede, Ajax, Nestor, Idoménée, ou Helene, mais ce n’est pas eux qui ont le grand rôle dans ce roman.
Ce récit de la guerre de Troie est, tout simplement, stupéfiant.
Tandis que les mythes classiques parlent de la gloire et des conquêtes des hommes, Pat Barker se concentre sur la présence silencieuse et sans prétention des femmes. Élégamment écrit à partir du point de vue de Briséïs, tu vas lire cette légende d’une perspective unique qui est souvent négligée.
Ce qui m’a vraiment conquis dans ce roman c’est la façon dont l’auteure nous dépeint Achille. Un être très complexe. Très éloigné de l’image que je m’en faisais.
Pat Barker écrit comment sa relation avec Briseïs se développe à partir du moment où elle est capturée et offerte à Achille comme butin de guerre.
Pat Barker nous fait envisager ces batailles sous une autre vision.
Celles des femmes. Après un territoire conquis, elles étaient capturées, violées, humiliées, déshumanisées.
Une autre violence du conflit. Des conflits, car si cela se déroule durant la guerre de Troie tu peux totalement juxtaposer les faits de nos jours.
Briséïs, narratrice, nous conte son calvaire et celui de ses comparses. Celui avant qu’elle soit capturée et la vie qu’elle mène aujourd’hui dans le camp.
Elle porte un regard aiguisé sur sa situation. De son adaptation dépend sa survie.
Une héroïne qui était soumise avant d’être enlevée et qui va se révéler.
Elle ne va pas courber l’échine comme elle l’a toujours fait. Les hommes ont, jusqu’à présent, toujours dirigé sa vie. Plus maintenant. Elle voit dans sa captivité une chance de s’émanciper de la mainmise des hommes.
D’actes ignobles, elle va développer une très grande force de caractère. Pour elle et pour ses compagnes d’infortune.
C’est une héroïne que j’ai adoré voir évoluer.
Pat Barker choisit d’orienter son récit non pas sur les descriptions de lieux, mais via la psychologie de ses personnages. Chaque parole, chaque ordre, fait ou geste est analysé à la loupe.
Les personnages ont une psychologie dense et fouillée, analysée minutieusement.
Toutes les émotions d’Achille semblent être différentes nuances de colère, mais comme je te le dis plus haut c’est un être complexe. Je n’ai pas aimé ⎌ce personnage par contre, j’ai adoré Patrocle.
« Je sentais qu’Helene prenait ainsi le contrôle de sa propre histoire. Elle était isolée dans cette ville, si impuissante. Même à mon âge je m’en suis rendu compte. Et ces tapisseries étaient une façon de dire : je suis ici. Moi. Un individu. Pas simplement, un objet à contempler, et pour lequel se battre. »
Briseis emplie de chagrin, de souffrance, endeuillée ne va pas se résigner.
Elle veut continuer à se battre même en silence.
Les plus grandes batailles ne se mènent-elles pas dans l’ombre ?
C’est un très bon roman historique.
Le thème de ce livre est la survie, ou plutôt la subsistance.
Briseis faisait partie de la noblesse et est réduite au statut d’esclave. Concubine de Achille.
Son sort est malgré tout plus enviable que celles des autres femmes. Uniquement des femmes ; les hommes, qu’ils soient des personnes âgées, des guerriers, des enfants, des bébés, tous ont été exécutés sous les yeux des épouses, mères, sœurs et filles.
Aucun détail n’a été épargné pour ta sensibilité dans ce livre.
Des passages sont douloureux à lire.
Ce livre ne parle pas seulement de Briseis, il parle de guerre.
C’est peut-être un livre brutal, mais c’est beau dans sa cruauté austère.
La plume de Pat Barker est fluide, l’auteure s’approprie avec audace le récit mythique de la guerre de Troie et, à travers la voix de ces femmes, nous offre une lecture extrêmement prenante.
C’est une de mes meilleures lectures du mois d’août.
✩ Le silence des vaincues ⟷ Pat Barker ⟷ 352 pages ⟷ Éditions Charleston, le 25 août 2020 ✩
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