PRÉSENTATION DE L’ÉDITEUR :
Paris, 1950. Eliza Donneley se cache sous un nom d’emprunt dans un hôtel miteux. Elle a abandonné brusquement une vie dorée à Chicago, un mari fortuné et un enfant chéri, emportant quelques affaires, son Rolleiflex et la photo de son petit garçon. Pourquoi la jeune femme s’est-elle enfuie au risque de tout perdre ?
Vite dépouillée de toutes ressources, désorientée, seule dans une ville inconnue, Eliza devenue Violet doit se réinventer. Au fil des rencontres, elle trouve un job de garde d’enfants et part à la découverte d’un Paris où la grisaille de l’après-guerre s’éclaire d’un désir de vie retrouvé, au son des clubs de jazz de Saint-Germain-des-Prés. A travers l’objectif de son appareil photo, Violet apprivoise la ville, saisit l’humanité des humbles et des invisibles.
Dans cette vie précaire et encombrée de secrets, elle se découvre des forces et une liberté nouvelle, tisse des amitiés profondes et se laisse traverser par le souffle d’une passion amoureuse.
Mais comment vivre traquée, déchirée par le manque de son fils et la douleur de l’exil ? Comment apaiser les terreurs qui l’ont poussée à fuir son pays et les siens ? Et comment, surtout, se pardonner d’être partie ?
Vingt ans plus tard, au printemps 1968, Violet peut enfin revenir à Chicago. Elle retrouve une ville chauffée à blanc par le mouvement des droits civiques, l’opposition à la guerre du Vietnam et l’assassinat de Martin Luther King. Partie à la recherche de son fils, elle est entraînée au plus près des émeutes qui font rage au cœur de la cité. Une fois encore, Violet prend tous les risques et suit avec détermination son destin, quels que soient les sacrifices.
Au fil du chemin, elle aura gagné sa liberté, le droit de vivre en artiste et en accord avec ses convictions. Et, peut-être, la possibilité d’apaiser les blessures du passé. Aucun lecteur ne pourra oublier Violet-Eliza, héroïne en route vers la modernité, vibrant à chaque page d’une troublante intensité, habitée par la grâce d’une écriture ample et sensible.
Premier coup de cœur de 2020, ce livre est un tourbillon de vies, d’amour et d’histoire.
C’est Violet Lee qui va se révéler à toi sous des facettes qu’elle ne connaît pas encore d’elle, d’autres qu’elle a fuis ou enfouis.
Femme passionnée et passionnante, ce roman m’a emporté dans la fièvre du jazz des caves parisiennes des années 50 jusqu’aux manifestions pacifistes de Chicago en août 1968.
Le roman est découpé en deux parties. Celle durant les années 50 où Violet débarque de Chicago armée de son Rolleiflex à Paris.
Elle est en fuite, de quoi, sans le savoir précisément, on s’en doute.
Ensuite, il y a la seconde partie qui cette fois se déroule à Chicago.
Violet c’est une femme née à une époque où les seules aspirations qu’elle pouvait avoir pour son avenir étaient d’être épouse et mère.
Sans ça, elle n’était pas accomplie.
Violet quitte tout pour se réinventer à Paris. Paris que son père, le premier homme de sa vie, lui a raconté.
Son père lui a appris à observer ce qui l’entoure, à ne pas détourner les yeux de la misère.
Violet a une passion pour la photographie, elle a l’œil qui met à nu les sourires de façades.
Elle capte cette lueur d’espoir dans les yeux de ceux qui ont tout perdu, mais qui y croient encore.
Ces inconnus sont les premiers à la révéler. Elle a un don, elle peut faire quelque chose de ce don pour peut-être faire avancer les mentalités.
Violet se révélera aussi grâce à Henry, Robert, Rosa, Tim, Horatio, Sam.
Des personnes qui vont compter dans sa vie.
Surtout 3. Son fils évidemment qu’elle n’a pu emmener avec elle.
Son fils. Son souffle, son espoir de possibles retrouvailles, un jour.
» Il me manque à hurler. J’installe sa photo sur la table de nuit. Chaque nuit, je formulerai en la regardant le vœu qui me permet de trouver le sommeil, dirige ma peine vers un objectif. À l’instant où ce mot surgit dans ma pensée, il reste posé là comme mon Rolleiflex, chambre à attraper les images, à retenir ce qui va mourir. »
Sam, Américain comme elle qui lui montrera qu’elle peut aimer.
Vraiment aimer.
Il ne cherchera pas à l’enfermer dans un nouveau carcan, avec lui c’est la femme amoureuse, mais libre de ses actes.
Celui qui lui donnera, à mon sens, la plus grande liberté à Violet sera Horatio, ce jazzman aveugle, mais qui voit tellement plus que les voyants.
Henry lui aussi participera à se révéler, à révéler ce qu’il se passe vraiment dans le ghetto noir de Chicago.
Robert, un photographe comme elle, un photographe humaniste comme l’a été Doisneau.
Il lui montrera ce qu’elle n’a pas encore vu de Paris.
Le Paris historique, ses ruelles, ses bâtiments cachent la misère d’Aubervilliers par exemple.
Il lui montre que si chez elle c’est le racisme anti noir qui domine, ici à Paris c’est le racisme anti maghrébin.
» Robert était entré en photographie en comprenant qu’elle lui permettait de choisir son camp. À travers son travail, il exprimait sa rage devant les injustices et sa tendresse pour les petites gens, témoignait que leurs vies n’étaient dépourvues de lumière ni de fraternité. »
Le racisme et l’histoire de Chicago sont une grande partie de la trame du roman de Gaëlle Nohant.
Elle nous offre tout un pan de l’histoire de cette ville américaine. Du crash de Wall Street jusqu’en 1968.
Elle nous montre que le racisme à Chicago était plus pernicieux. On ne l’affichait pas comme dans le sud des USA, mais il était bien présent.
Elle explique l’insalubrité des logements qu’on leur louait. Les marchands de sommeil de 1950.
J’ai vécu les deux parties comme un avant et un après.
Un avant où Violet fuit et se réinvente dans la Ville lumière où elle rend la dignité aux oubliés de la société.
On observe son image, son caractère, sa psychologie, ses failles, ses peurs, ses angoisses.
Elle nous révèle peu à peu son passé.
Son enfance, sa vie de femme mariée à Adam.
J’ai eu l’impression de voir la photo de Violet floue au début, pleine de lumière et de poids à la fin de la première partie.
Une première partie qui m’a laissée très émue.
On sent vraiment la peur de cette jeune femme.
On se demande bien quel danger peut la poursuivre depuis Chicago jusque dans cette pension de jeunes filles où elle a trouvé refuge.
Ensuite, il y a la seconde partie, 18 ans plus tard.
Elle repart sur les traces de son passé. Elle se sent la force de l’affronter et là on est plongé en plein milieu du tumulte des manifestations durant la convention démocrate d’août 1968 à Chicago.
Peu après l’assassinat de Martin Luther King, peu avant celui de Robert Kennedy.
Cette seconde partie est totalement différente de la première, mais pas moins intéressante.
On ressent la même urgence.
Dans la première, c’était l’urgence de vivre.
L’urgence de faire attention à qui elle parlait, ce qu’elle révélait d’elle. La deuxième, on a l’urgence de photographier l’injustice, le climat politique. Les mouvements civiques.
Avec, bien sûr, toujours en toile de fond, la vie de Violet.
Violet, une femme que je ne pourrai oublier.
C’est une histoire de femmes, de mères, d’amantes, d’amies.
C’est l’histoire d’une femme forte avec des valeurs chevillées au corps, des valeurs transmises par son père et qu’elle refuse de dénigrer.
C’est un roman inspirant pour de nombreuses femmes. Gaëlle Nohant te chuchote que rien n’est impossible ou comme son ami Henry le dit :
« Non, Eliza, c’est ta peur qui parle. J’ai vécu plus longtemps que toi sur cette Terre. Assez pour savoir qu’il n’y a pas d’impasse. Seulement des murs que nous nous dressons nous-mêmes. »
Rien n’est impossible. Tu peux tomber au plus bas et te relever.
On peut, on a le droit de recommencer à zéro.
Violet n’a peur de rien. Son arme et son bouclier c’est son fidèle appareil photo.
Rolleiflex puis Leica.
Elle ne craint pas de retrouver un amour perdu même tant de temps après ni même d’affronter la police.
Elle se doit d’être là, d’immortaliser ces moments historiques.
Tant pis pour les matraques et gaz lacrymogènes.
« Ce que vous nous montrez, c’est leur beauté, leur fierté. Regardez ces visages de gosses, ces jeunes femmes qui nous sourient dans leur décor glauque, ces vieillards qui ont l’air d’avoir traversé le temps, d’avoir fait toutes les guerres… Ce qui touche, ce n’est pas leur univers sordide, c’est le regard que vous portez sur eux. Rien de misérabilisme, vous n’en faites pas des victimes. Au contraire, vous leur rendez leur dignité. En miroir, vous ridiculisez ce monde blanc qui les traite en inférieurs. »
Gaëlle Nohant aborde des questions de société et nous offre aussi un roman passionnant.
Par son héroïne, Violet Lee, elle raconte la grande Histoire, celle de la guerre du Vietnam, de la ségrégation raciale, des mouvements civiques.
Je dois dire que je ne connaissais pas l’histoire de Chicago.
Ni son déclin, ni sa puissance de construction ni la politique régnante, ou si peu.
» Je lui parle d’une ville où la ségrégation ne s’affiche pas sur des pancartes, où on ne lynche pas les Noirs devant des croix enflammées pour leur apprendre à rester à leur place. Une ville dont ils ont découvert les règles à leurs dépens s’ils s’écartent de certaines rues, entrent dans certains bars, postulent pour certains emplois. Je lui raconte les représailles qu’ils subissent lorsqu’ils emménagent dans un quartier blanc. Les bombes déposées sous leurs porches, les foules haineuses, la passivité complice de la police. »
On lit avec beaucoup d’émotion cette ségrégation toujours régnante aux USA.
Ces riches hommes d’affaires qui se remplissent les poches grâce à la misère humaine.
On lit les conditions de vie de ces hommes et femmes qui ont quitté le sud pour un espoir de vie meilleure et qui se retrouvent dans des cages si petites, si insalubres.
C’est l’histoire de cette jeunesse de 68 qui lutte contre la corruption, le capitalisme, le racisme, qui refuse la guerre. Ils veulent faire entendre leurs voix au monde.
Ils sont pleins d’espoir pour une société où le vivre ensemble existerait enfin.
Gaëlle Nohant nous prouve une fois encore qu’elle a ce don de conteuse.
Je me suis laissé bercer par ces mots, ces magnifiques citations.
J’ai été émue, passionnée, j’ai vibré aux côtés de Violet.
Les autres personnages ne sont pas en reste, ils sont tous charismatiques. Rosa m’a particulièrement émue, mais tous laisseront une trace en moi comme ils ont marqué la vie de Violet.
On sent le profond travail de recherche de l’auteure, la passion qu’elle a eue à écrire la vie de son héroïne, surtout les vies qui se jouaient devant son objectif.
Pas une phrase, pas un mot ne m’a semblé de trop. Au contraire, j’en voulais encore.
Un roman passionnant que je te conseille vivement.
Un roman réaliste, ancré dans l’histoire et la société, porté par une plume poétique, visuelle et une héroïne mystérieuse qui peu à peu va se révéler à toi si jamais tu veux bien observer.
Regarder n’est pas toujours suffisant.
Une très belle fresque romanesque et historique.
Un superbe portrait de femme, mais pas uniquement.
» Je ne peux pas être pessimiste parce que je suis vivant. Je crois que nous en sommes là. Tant que nous respirons, nous continuerons à croire que nos pattes de fourmi peuvent infléchir les tragédies programmées, et qu’un peu d’amour et d’intelligence suffisent à éclairer la nuit. »
✩ La femme révélée ⟷ Gaëlle Nohant ⟷ 384 pages ⟷ Grasset, le 2 janvier 2020 ✩
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Mimi21 dit
Je suis actuellement « dedans » et j’adore cette lecture … je suis en en empathie complète avec l’héroïne de ce roman.