Au milieu des cendres de la défaite de l’Allemagne nazie, dans l’immédiat après-guerre, Marianne von Lingenfels revient dans le château, autrefois grandiose, des ancêtres de son époux, une imposante forteresse de pierre désormais à l’abandon. Veuve d’un résistant pendu à la suite de l’assassinat raté de Hitler, le 20 juillet 1944, Marianne a bien l’intention de tenir la promesse faite aux courageux conspirateurs dont son mari faisait partie : retrouver et protéger leurs enfants et leurs femmes, devenues comme elle des veuves de résistants.
En rassemblant cette famille de bric et de broc, Marianne croit que les chagrins partagés vont les souder. Mais elle s’aperçoit rapidement que ce monde en noir et blanc, plein de principes est devenu infiniment plus complexe et alourdi de sombres secrets qui menacent de les déchirer. Ces trois femmes se retrouvent finalement confrontées aux choix qui ont défini leurs vies avant, pendant et après la guerre, avec de nouveaux défis à relever.
« Ania examina cette femme qu’elle connaissait si bien et dont pourtant elle ne savait rien. Leurs vies s’étaient retrouvées emmêlées durant une période tellement étrange — sans contexte, coupée du passé, avant tout avenir. Une époque régie par les besoins de base.
Que savaient-elles vraiment l’une de l’autre ? »
Un roman qui va te parler d’un point de vue différent de celui que nous avons l’habitude de lire.
Ici, il s’agit de la vie de 3 femmes. Veuves de résistants allemands, tous tués pour avoir tenté d’assassiner Hitler.
Si tu désires en savoir plus sur ce fait historique je t’invite à visiter la page Wikipedia dédiée à Klaus Von Stauffenberg https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Claus_von_Stauffenberg
L’ai-je oublié de mes cours d’histoire parce que ce fait ne m’a pas marqué ?
En tout cas, lire le point de vue d’un groupe de résistants allemands m’a fait dévorer ce roman.
Même s’il faut le dire on se concentre surtout dans ce roman sur les épouses durant l’avant, mais surtout l’après-guerre.
Le livre commence en 1938 au château de la comtesse Von Ligenfels.
L’ambiance est à la fête pour quasi tous ces Allemands intellectuels et artistes sauf pour un petit groupe d’amis réunis dans le bureau de Albrecht, le mari de Marianne.
Dans ce bureau, il y a aussi Connie, meilleur ami de celle-ci.
Tous demandent à l’intrépide Marianne de tenir son rôle c’est-à-dire de veiller sur leurs familles.
Femmes et enfants. La plupart n’étant pas au courant du rôle joué par leurs époux par souci de leur sécurité à elles.
La soirée se déroule le 9 novembre 1944 un jour connu plus tard pour la terrible nuit de cristal.
Lien Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Nuit_de_Cristal
Tu bascules ensuite après ce chapitre en mai 45 toujours au Burg Lingenfels, mais cette fois c’est une tout autre ambiance qui règne entre les murs. Ni champagne ni musique, mais des femmes.
3 femmes et leurs enfants.
Marianne s’est fait un devoir de rechercher les veuves et de les réunir au château relativement sûr grâce au rôle joué par Albercht, l’époux de Marianne et par Connie le mari de Benita.
Les Américains le savent et les femmes sont protégées par les soldats.
Benita y réside avec Martin.
Marianne avec Elizabeth, Fritz et Karolina
Ania avec Wolfgang et Anselm.
Même si la vie est dure elle l’est moins qu’ailleurs en Allemagne au sortir de la guerre.
Petit à petit, ces 3 femmes et leurs enfants se reconstruisent et tentent d’oublier les épisodes drolatiques vécus.
Marianne la cheffe de cette drôle de famille recomposée connaît-elle vraiment Ania et Benita ?
Le monde est-il construit uniquement de 2 teintes, le noir et le blanc ou d’une infinie palette de gris ?
C’est ce que Jessica Shattuck va te narrer.
L’écriture est un peu déroutante au départ, car les flash-back sont nombreux et pas toujours dans un ordre chronologique et pas toujours concernant la même personne, mais c’est on ne peut plus normal si l’on veut comprendre nos 3 héroïnes et l’Allemagne telle qu’elle fut, telle qu’elle s’est redressée et telle qu’elle est aujourd’hui.
Le roman se termine en 1991.
Ces retours dans le passé apportent une dimension psychologique très intéressante sur la population allemande durant l’entre-deux-guerres, durant la guerre et dans les années immédiates après la signature de l’armistice.
Tu vas lire la montée du nazisme, comment il est perçu dans les villes et à la campagne.
Tu vas surtout apprendre à moins diaboliser les Allemands. Je l’ai toujours pensé que tous n’étaient pas mauvais, mais n’avaient pas eu le choix.
L’auteure ici te le démontre clairement.
Elle insiste sur ce point.
Elle te montre la propagande, les mensonges dont était abreuvé ce peuple.
Ceux qui y croyaient, ceux qui voyaient surtout un espoir que l’Allemagne se relève.
Tu ne liras pas énormément de faits militaires, suffisamment pour te faire ressentir l’atmosphère des différentes parties du récit.
Jessica Shattuck te dresse un portait de femmes. Un portait dans toute leur humanité.
Leurs failles, leurs craintes et leurs secrets.
Elle évite tout au long de ces 458 pages de tomber dans le trop-plein d’horreur.
Il n’y a à aucun moment surenchère.
En peu de phrases, sans prononcer les mots tu devines la situation.
C’est un superbe roman axé sur la psychologie des personnages.
Une fiction basée sur l’histoire, mais une histoire vue à travers 3 destins différents.
Qui sont réellement Marianne, Ania et Benita ?
Quelles étaient leurs aspirations ?
Que vont-elles devenir elles et leurs enfants ?
Marianne et ses idées très tranchées sur ce que l’on peut être et ce que l’on doit condamner.
Si on ne peut lui enlever son courage et sa bravoure, ses opinions arrêtées vont parfois te faire serrer les dents.
Pourtant tu vas la comprendre.
Benita, la jeune fille, jeune femme fragile, à fleur de peau qui a quitté sa campagne natale pour épouser le beau Connie qu’elle n’a pas assez connu. Benita que le passage en prison, la séparation de son fils et les autres faits qu’elle a vécu l’ont terriblement changé.
Ania c’est l’efficace et l’énigme. Elle veut se racheter auprès de ses fils et leur construire un avenir.
C’est le personnage que j’ai le plus aimé dans le récit. L’auteure m’a mené en bateau, mais j’ai aimé cette direction, ce parti pris.
J’ai pu me poser et réfléchir. Tout être humain ne se résume-t-il que par son passé ? Est-il responsable de ses actes ou de son ignorance ? Le pardon est-il possible ?
Jessica Shattuck va ébranler tes certitudes, te secouer tout en te faisant réfléchir et en te racontant l’histoire de ces 3 femmes.
Tu vas lire ceux qui ont été directement opposés au nazisme, ceux qui ont adhéré faute de mieux, ceux qui ne comprenaient pas tous les enjeux, car trop jeunes ou mal informés, ceux qui ont été enrôlés de force.
Ceux qui ont préféré faire l’autruche plutôt que de voir ce qui se passait réellement sous leurs yeux.
Ceux qui se sont tus pour protéger leurs familles.
Ceux qui vivent avec la culpabilité, ceux qui ont trop honte pour pouvoir ne seraient-ce qu’en parler à leurs enfants, ceux qui sont encore pleins d’amertume et de colère.
Ceux qui tentent de se reconstruire et ceux qui n’en ont plus la force.
Ceux qui s’entêtent dans leur conviction et ceux qui croient en la rédemption.
C’est vraiment un très beau roman même si je déplore quelques longueurs et que j’aurais aimé un peu plus d’éclaircissement sur le passé d’Ania. On en a, mais un point essentiel m’a manqué.
Ces quelques malheureux points négatifs ne m’ont pas empêché de vraiment apprécier ce livre d’un point de vue inédit.
J’ai lu des faits que je connaissais, j’ai appris d’autres choses.
Je me suis surtout glissée dans la peau de ce peuple allemand.
Tu comprends mieux l’idéologie nazie, la manière dont elle s’est répandue… de grès ou de force.
Jessica Shattuck ne pointe à aucun moment du doigt les exactions d’une nation ou l’autre.
Il ne nous appartient pas de juger, mais de lire, comprendre et diffuser ce message pour ne jamais revivre cet épisode tragique de notre histoire.
Un roman complexe, poignant et instructif.
Une écriture fluide, rigoureuse et mesurée.
Objective et sensible
Le destin de 3 femmes profondément humaines et à travers elles l’Allemagne du 3e Reich qui n’était pas construit uniquement de monstres et de tortionnaires.
✩Château de femmes ⟷ de : Jessica Shattuck ⟷ 480 pages ⟷ Edition JC Lattès, le 31 octobre 2018✩
2
Vampilou fait son Cinéma dit
Ah ça c’est intéressant, un point de vue très peu abordé et pourtant, il ne faut pas oublier que tous les allemands n’étaient pas nazis et beaucoup étaient contre ce qu’il se passait !
Vivi Jnx dit
Kikou tite souris ,l atrocité de cette guerre nous fait trop souvent oublié que tout les allemands n était pas tous des bourreaux et qu’il y a eu des héros parmi eux et parce que il m arrive moi aussi parfois de tous les mettent dans le même panier ,je me doit de lire ce livre ,surtout que je sens qu’ il me plaira 😉😘
Cilinette
Eliane dit
Coucou, très belle chronique, envie d’en connaître plus sur ces trois femmes. Belle journée 😘❤️