Ça vous est déjà arrivé de terminer un livre et de ne pas savoir si vous l’avez aimé ou non ?
C’est ce que j’ai ressenti juste après la fin de ce roman, mais en écrivant les lignes que vous allez lire ensuite je peux dire que je suis passée à un cheveu du coup de cœur.
Il m’a juste manqué une explication pour un fait qui se passe à la fin du roman pour que cela soit le cas.
C’est un livre qui mérite vraiment d’être lu, découvert, mais il faudra vous armer de patience pour comprendre toute la complexité et le symbolisme que ses pages renferment.
Il vous faudra aussi passer outre les premières pages du roman qui sont parmi les scènes les plus horribles que j’ai pu lire.
C’est cruel, ignoble, tous les qualificatifs que vous voulez, j’ai d’ailleurs posé mon livre avant de le continuer après ce premier chapitre.
Rassurez-vous, c’est le passage le plus dur du livre, choix audacieux de l’auteur de le placer comme cela, mais en même temps il vous plonge directement dans le bain. Vous savez d’emblée que derrière ce titre ce n’est pas un conte de princesse, mais bien le destin de 2 femmes, 2 femmes aux antipodes l’une de l’autre. Elles n’ont, a priori rien en commun.
Le point commun que l’on peut remarquer d’emblée c’est que toutes deux sont hantées par le poids du souvenir. Elles veulent oublier, tout oublier.
Le lien entre ces deux femmes est bien plus que ce simple fait, mais je ne peux vous en dire plus.
Anoua vit dans une tribu ancestrale subsaharienne tandis que Queenie finit ses jours dans une villa au bord d’une plage de Californie.
Les chapitres alternent les voix de Anoua et de Queenie, je me suis d’abord plus attachée à Anoua, ressentant beaucoup d’empathie pour cet enfant qui n’a rien demandé à personne, mais qui est destinée à se donner au chef de la tribu dès l’apparition de ses premières règles, elle est une petite reine pour sa tribu, c’est sa destinée.
Anoua m’a terriblement émue, c’est le personnage que j’ai préféré, les réflexions profondes qu’elle a sur la mort, sa condition de Petite Reine, de femme, sur l’amour, ce qu’elle est encore capable d’endurer ou pas m’ont touchée.
Queenie, quant à elle, j’ai eu mis plus de temps à l’apprécier pleinement, cette vieille dame a décidé qu’à son âge elle n’a plus à respecter les conventions, la politesse, elle insulte et mène la vie dure à son infirmière et à son médecin.
Plus j’avançais dans ma lecture plus je l’ai comprise, elle a elle aussi énormément souffert, derrière sa vulgarité, une carapace pour moi, se cache une femme qui a souffert dans sa condition de femme et qui n’a jamais pu oublier Julia. Pour savoir qui est Julia, vous devrez lire le livre.
La question de la maternité abordée par ce personnage m’a émue.
L’une des deux héroïnes va abandonner son enfant tandis que l’autre est stérile.
Je me suis finalement attachée à Queenie. Elle m’a fait rire avec son parler cache, mais aussi, serré le cœur. Son profond désir d’oublier, sa solitude. Le regard qu’elle porte sur la vieillesse ne me l’a rendu que plus sympathique.
L’auteur aborde aussi à travers ce personnage les thèmes de la maladie, de la démence et de l’euthanasie.
Le rythme du roman est effréné, les chapitres courts sur l’une et l’autre vous donnent envie de continuer la lecture pour comprendre tous les tenants et aboutissants.
Jimmy Lévy, à travers ses 2 héroïnes, nous écrit un roman à tendance féministe, ces deux héroïnes ne sont pas résignées à leur condition de femmes, elles sont bien décidées à être maîtres de leur destin. Peu importe ce qu’elles risquent ou ce que les gens pensent.
Le style de l’auteur est unique. Il décrit des scènes de violences, avec son personnage de Queenie la vulgarité est ce que l’on remarque au premier abord, mais la beauté de ce livre se cache justement dans ce langage sans tabou, des passages de poésie au milieu de la violence ou de la haine. Il fallait oser, Jimmy Lévy le fait et cela fonctionne parfaitement.
Il vous entraîne dans son roman de manière très brute de décoffrage pour arriver peu à peu à un style beaucoup plus sobre, une fin qui est tout le contraire du début. Émouvante et tendre.
Il a su éviter le piège de la surenchère, il aurait pu nous écrire un livre violent de bout en bout, mais au contraire tout est dosé et juste.
Le style de l’auteur sert son intrigue et colle parfaitement à la vie de Anoua et Queenie.
Un livre que je ne pensais pas avoir aimé à ce point, un livre que j’ai envie de relire et dont j’ai déjà relu certains passages. Un roman qui ne peut laisser indifférent.
Pourquoi je veux le relire, car je veux être certaine de ne pas être passée à côté de certaines choses ; je veux pouvoir trouver mes réponses à mes interrogations. Anoua est-elle une contemporaine de Queenie ? Existent-elles réellement l’une et l’autre ou est-ce juste l’histoire que nous raconte Queenie dans son carnet ?
Vraiment un roman de la rentrée littéraire que je vous recommande pour son originalité, les thèmes traités. Passez au-dessus de vos craintes, derrière la violence se cache la beauté des femmes.
Petites reines de Jimmy Levy – roman contemporain – littérature française – 272 pages, 19€ – Édition Le Cherche Midi, rentrée littéraire 2017 – En librairie depuis le 24 août 2017
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Eliane Blicq dit
Coucou mon Amie, une très belle chronique, la vie de ces deux femmes m'intéresse beaucoup, j'ai envie de savoir ce qu'est ou à été leur vie respective. Une belle découverte, merci. Gros bisous et bon week end